La Poste poursuit ses acquisitions dans la « silver économie »
L'entreprise publique rachète une nouvelle entreprise spécialisée dans la santé à domicile. L'Etat-actionnaire soutient mais ne valide pas tous les projets.
La Poste continue de se renforcer à un rythme accéléré dans la « silver économie », les services à destination des personnes âgées, ce qui l'amène à se rapprocher de plus en plus de l'univers de la santé. Le groupe public doit annoncer ce mardi le rachat de Diadom, une société spécialisée dans l'équipement médical à domicile des patients en urologie. Le montant déboursé par La Poste pour acquérir l'entreprise, qui doit réaliser un peu plus de 30 millions d'euros de chiffre d'affaires cette année, n'est pas connu.
Les compétences logistiques de Diadom vont compléter celles d'Asten, un autre prestataire de santé au domicile (750 salariés et 100 millions de chiffres d'affaires) racheté l'an dernier . Et, en 2016, c'est le réseau de prestations de proximité Axeo (ménage, jardinage...) qui était passé dans l'orbite de La Poste.
En trois ans à peine, l'entreprise s'est constituée un pôle important de services à la personne orienté vers les seniors. La partie la plus visible est cependant « Veiller sur mes parents », l'offre de visites à domicile assurées par les facteurs dans le cadre de leur tournée, qui permet de rassurer les proches et de prolonger le maintien à domicile des personnes dépendantes.
Mais les revenus générés par cette nouvelle activité restent embryonnaires, même si la direction de l'entreprise se dit très satisfaite du bénéfice en termes d'image. A ce stade, le chiffre d'affaires réalisé auprès des seniors, qui devrait atteindre 180 millions à la fin de l'année, repose donc quasi exclusivement sur la croissance externe.
Et celle-ci devrait se poursuivre. Avec une stratégie claire du côté de la direction : continuer la diversification de l'activité, pour pallier l'attrition continue du courrier, le coeur de métier historique. Dans cette perspective, Philippe Wahl, le PDG, est persuadé que La Poste, forte de son maillage de proximité et de son rôle de tiers de confiance, a tous les atouts pour répondre aux besoins liés au vieillissement de la population.
Ces acquisitions dans la « silver économie » se font avec le soutien de l'Etat-actionnaire, mais celui-ci n'approuve pas nécessairement tous les projets. Selon nos informations, la direction du groupe public a étudié durant plusieurs mois le rachat d'Happytal, une jeune pousse créée en 2013 qui propose un service de conciergerie pour les personnes hospitalisées : passage d'un coiffeur ou d'une esthéticienne, livraison d'une corbeille de fruits... Implanté dans 60 sites, Happytal revendique 15.000 clients par mois.
Mais lorsque le dossier est passé devant le comité stratégique du conseil d'administration, il y a environ un mois, les représentants de l'Agence des participations de l'Etat et ceux de la Caisse des Dépôts ont manifesté leurs réticences. Ils ont questionné la pertinence de l'opération : l'activité d'Happytal ne se fait pas au domicile, ce qui était le fil conducteur des précédentes acquisitions.
La direction en a pris acte, et le dossier a été écarté. Philippe Wahl a inscrit à l'ordre du jour du prochain conseil d'administration un point sur la « silver économie », qui sera sans doute l'occasion de réexpliquer la stratégie du groupe. Selon un expert, la problématique de la santé est indissociable des marchés liés aux seniors. Pour vendre sa logistique et ses services à domicile, La Poste doit donc trouver le moyen d'intégrer le parcours de santé des personnes âgées, et peut-être même un jour l'organiser (sa filiale Docapost a d'ores et déjà pris position sur ce sujet ). C'était sans doute pour cela qu'elle souhaitait investir dans Happytal.
Lionel Steinmann, avec Sharon Wajsbrot, publié le 30/10 par Les Échos
Veiller sur mes parents », l'offre de visites à domicile assurées par les facteurs dans le cadre de leur tournée, est la vitrine de l'offensive de La Poste sur le marché des services aux seniors. - Pierre Mériméee/Rea