En cas d'urgence : les seniors à la rescousse – Les Transmetteurs -

Publié le par Or gris : seniors acteurs des territoires

Suite aux attentats du 13 novembre à Paris, les cellules d'urgences médico-psychologiques mises en place partout en France ont requis l'appui de médecins retraités bénévoles au sein de l'association, "Les Transmetteurs".

Cette association, créée en 2005 par le Dr Xavier Emmanuelli, fondateur du Samu social, compte une centaine de médecins retraités. "Nous intervenons beaucoup sur des suicides devant témoins, raconte Brigitte. En mai 2013, avec Nicole Cabanel, nous avons été appelées en seconde ligne dans une école parisienne où un homme venait de se suicider sous les yeux d’une dizaine d’élèves. Il fallait leur parler et rassurer les familles, les enseignants…"

Après les attentats, des médecins retraités des Transmetteurs sont réquisitionnés depuis lundi 16 novembre. À pied d'œuvre dès les premières opérations, ils s'étaient préparés à intervenir en cas de catastrophe en participant notamment à des "exercices catastrophe"

Par exemple, le 21 mai 2014, l’hippodrome de Chartres a servi de décor à une de ces simulations, sur un scénario d'explosion chimique. L'occasion pour tous les personnels soignants  de vérifier l’efficacité des procédures. Sur place, nous avons suivi, trois médecins retraités: Guillaume, Nicole et Brigitte, des réservistes membres des "Transmetteurs"

"Il y a deux ans, j’avais participé à une simulation de crash aérien, avec un véritable avion au sol ! Ces exercices sont spectaculaires, car le réalisme fait partie de l’entraînement", commente Nicole Cabanel, en contemplant les 180 élèves infirmiers qui jonchent les gradins de l’hippodrome de Chartres, dans le rôle des victimes. "Je suis ici en tant que bénévole des Transmetteurs", précise cette ancienne anesthésiste-réanimatrice de 71 ans, qui se penche sur une fausse victime pour la réconforter. Sous les gestes experts de Nicole, la jeune femme couverte de maquillage rouge joue son rôle en décrivant ses douleurs. "Nous ne sommes pas dans le stress d’un réel danger de mort, reconnaît Nicole, mais l’organisation des secours, l’urgence de poser un diagnostic sont bien réelles. Nous savons que cette situation pourrait se produire et la survie de blessés graves dépendrait alors de l’efficacité de nos réactions à tous."

Le scénario imaginé pour cet exercice a de quoi faire frémir: ce jour-là, à 13 h 30, une prise d’otage sur l’hippodrome de Chartres dégénère en fusillade, occasionnant l’explosion d’une substance hautement toxique. Les secours, arrivés sur place vingt minutes après le drame, annoncent un bilan provisoire de 15 morts et 160 blessés.

"Ce scénario n’est pas de la science-fiction, il est étudié dans les services d’urgence, car il pourrait se produire", assène le Pr Pierre Carli, chef du service d’anesthésie-réanimation de Necker, à Paris, et président du Conseil national de l’urgence hospitalière (Cnuh), qui a organisé l’exercice avec le Dr Michel Nahon, du Samu de Paris. "On compte une trentaine d’exercices de ce type chaque année en France, explique ce dernier, mais seul le nôtre est à dimension universitaire. Cinquante étudiants en médecine y participent et sont notés."

Vue de près et en temps réel, l’organisation des secours démontre que notre système d’urgence est très performant. Elle permet aussi de mesurer à quel point le respect méticuleux de la procédure est décisif pour éviter la mauvaise gestion des soins. "Face à une crise, il faut prendre dix minutes pour décider qui commande et où installer les zones de soins, confirme Suzanne Tartière, médecin au Samu et vice-présidente des Transmetteurs. Quand le Samu est arrivé sur place après le déraillement de Brétigny-sur-Orge, en juillet 2013, nous avons tout de suite désigné les commandements et installé le poste médical avancé (PMA), qui trie les blessés et les envoie dans des zones différentes selon la gravité de leur état." Les secours dits de première ligne gèrent ce plan et dispensent les soins. "Mais l’état d’un blessé apparemment léger peut se dégrader, explique Brigitte Hermet, ancienne généraliste de 71 ans, en charge chez les Transmetteurs des urgences médico-psychologiques. Il faut donc aussi du personnel qualifié pour maintenir une surveillance et un dialogue constants: les Transmetteurs participent à ce travail dit de seconde ligne."

Florence Monteil, publié dans Notre temps le 16 novembre 2015

http://www.notretemps.com/sante/exercice-preparation-attentats-paris-urgence-medecin-retraite-requisition,i99014

TEMOIGNAGE

"J’ai envie de transmettre ce que j’ai appris" Dr Catherine Roche

Médecin du travail à la retraite, membre de l'Association Les Transmetteurs

« Mon métier m’a passionnée... » Catherine Roche reconnaît pourtant qu’au départ, le choix de la médecine du travail n’en était pas un : « Je venais de me marier, j’attendais un enfant et n’avais pas envie de sacri er ma vie familiale. Finalement, j’ai exercé cette spécialité avec enthousiasme" Le Docteur Roche s'est fortement investi dans la prise en charged'un probléme de santé publique qui, avant les années 1980, préoccupait peu les médecins : la souffrance mentale au travail. « C’était alors le début des emplois précaires », précise-t-elle. Cela l’a aidée à aiguiser ses capacités d’écoute et à vouloir les améliorer. « En 1993, j’ai suivi une formation à l’écoute qui a transformé mon approche du métier. Souvent, quand on est jeune médecin, on croit tout savoir des autres. Là, j’ai appris la modestie. On ne sait rien d’emblée, parce que chaque personne a son histoire et sa façon de réagir.
Le meilleur moyen de savoir un peu et de comprendre, c’est d’écouter vraiment la personne, en partant de zéro... »
En septembre 2006, lorsque Catherine Roche prend sa retraite, elle souhaite que tout ce qu’elle a appris ne soit pas perdu. Elle a envie de donner un peu de ce qu’elle a reçu. Reste à trouver le cadre.« Je suis tombée sur une documentation présentant l’association fondée par Xavier Emmanuelli, Les Transmetteurs, qui répondait très exactement à ce que je recherchais. »
Son principe : les médecins retraités ont des compétences et une expérience qu’il serait dommage de ne pas utiliser. Elles peuvent être précieuses en cas de crise sanitaire, par exemple.
« J’ai suivi des miniformations pour acquérir des gestes techniques et méthodologiques dont je n’avais pas la pratique dans mon exercice passé. Cela devrait me permettre de me rendre utile... »
Les Transmetteurs souhaitent également former des jeunes aux métiers de proximité du secteur médico-social. « Il s’agit de transmettre quelque chose sur le savoir-être (plus que sur le savoir- faire) aux jeunes qui vont se diriger vers les nouveaux métiers
d’aide à la personne (personnes handicapés, âgées, atteintes de la maladie d’Alzheimer, en déshérence, etc.) », conclut Catherine Roche. Retraitée, certes, mais pas en retrait.

https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/cn_bulletin/odm%20nov%202008%20complet.pdf

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