Argent, numérique, sexe : 6 préjugés sur la vieillesse pour en finir avec l’âgisme
Face à la vague de commentaires haineux envers nos aînés pendant la présidentielle, les Petits Frères des Pauvres font tomber les préjugés.
Durant la crise sanitaire et plus récemment pendant les élections, on a pu voir passer de nombreux propos âgistes sur les réseaux sociaux. « Le résultat de dimanche ne tient peut-être qu’à un somnifère dans la tisane », « on peut juste leur retirer le droit de vote », « on a sauvé les vieux avec le vaccin. Grossière erreur »… Autant de messages haineux qui ont fait l’objet d’une campagne des Petits Frères des Pauvres. « Il est urgent de rappeler que l’âgisme, tout comme le racisme ou le sexisme, est puni par la loi », a répondu l’association aux commentaires, non sans une certaine classe. Voici 6 préjugés que l’association de lutte contre l’isolement des personnes âgées ne voudrait plus entendre à l’avenir.
1. Les personnes âgées sont des « nantis »
Tous riches les vieux ? Ce cliché a la peau dure, notamment depuis la campagne présidentielle où l’on imagine les personnes âgées comme de fidèles apôtres de la politique néo-libérale du président réélu Emmanuel Macron. Or, il est utile de rappeler que nos aînés ne sont pas tous et toutes logés à la même enseigne. En 2020, près de 350 000 femmes et 280 000 hommes étaient allocataires du minimum vieillesse (allocation de solidarité aux personnes âgées), une aide financière mensuelle accordée aux retraités ayant de faibles ressources et vivant en France, selon les données de l’Insee.
C’est ce type d’aides, mais aussi la proportion moindre des ménages, qui permettent aux personnes de 65 ans et plus (hors personnes vivant en institution, Ehpad, maisons de retraite, hôpitaux de long séjour, etc.) d’avoir un niveau de pauvreté plus faible (8,6 %) que pour l’ensemble de la population française (14,8 %), toujours selon l’Insee.
2. Les aînés ne sont plus actifs
Une croyance laisse penser que les personnes âgées ne s’investissent pas dans la société française. Or, c’est mal connaître le quotidien de ces hommes et de ces femmes dont les vieux jours permettent de s’engager dans la vie associative ou de se consacrer à un loisir en solo ou avec leurs proches. Du fait de l’arrêt de leur activité professionnelle, nos aînés dédient la majeure partie de leurs journées aux loisirs : 7h33 en moyenne.
Si les deux tiers de ce temps se déroulent au domicile (télévision, repos), l’autre tiers permet, pour certaines personnes, de pratiquer une activité sportive, un loisir créatif ou encore de s’engager dans le bénévolat. 5 millions de personnes âgées sont ainsi investies dans le milieu associatif selon le ministère de la Santé. Avec près de 90 % des associations qui ne fonctionnent qu’avec des bénévoles, les 34 % de bénévoles de plus de 50 ans qui y sont investis (selon les derniers chiffres de l’étude de Recherches & Solidarités, édition 2020-2021), représentent aujourd’hui la force vive de ces organisations !
3. Les vieux sont allergiques au numérique
Nos aînés sont éloignés du numérique, c’est un fait. 27 % des personnes de 60 ans et plus n’utilisent jamais Internet, selon une étude des Petits Frères des Pauvres et de l’Institut CSA (2021). Cela représente 3,6 millions de personnes éloignées du numérique à leurs dépens, faute de moyens et d’accompagnement social.
Pourtant, le numérique peut avoir un impact positif sur la vie des vieux et des vieilles. On l’a vu pendant le confinement : les groupes de messageries instantanées ont permis aux familles de rester connectées avec les grands-parents ou grands-tantes éloignées plus facilement, faisant ainsi reculer leur sentiment d’isolement, un fléau majeur dans le quotidien du grand âge, dont nous vous parlions déjà dans cet article : https://positivr.fr/comment-petits-freres-des-pauvres-rompt-isolement-des-aines/
Les smartphones ont même gagné du terrain chez les personnes âgées depuis la pandémie même si elles utilisent ces outils avec parcimonie, comme on peut le lire dans Le Temps. En cause ? Leurs compétences restent encore assez faibles (seulement 13 % des personnes retraitées se disent “très compétentes” avec un ordinateur, contre 31 % en moyenne dans la population) malgré le désir d’être formées au numérique.
4. Les personnes âgées ont une libido au point mort
La sexualité des personnes âgées est encore taboue dans notre société. Pourtant, vieillir n’est pas forcément synonyme d’abstinence. C’est ce qu’a montré une étude de l’Université de Manchester. Menée sur 7 000 personnes de plus de 70 ans, elle indique que plus de la moitié des hommes (54 %) et un tiers des femmes (31 %) continuent à avoir des rapports sexuels, rapporte les Petits Frères des Pauvres.
Une autre étude de The Kinsey Institute à l’université de l’Indiana, montre que même si la fréquence des rapports diminue avec le temps, la majorité des femmes et des hommes de 60 à 80 ans déclarent être toujours enthousiastes à propos de la sexualité et de l’intimité. Mieux encore : environ 20 % des personnes de plus de 65 ans ont une vie sexuelle « meilleure que jamais », selon une étude de l’Université Duke !
5. L’environnement est la dernière de leurs préoccupations
Les vieux ne s’intéressent pas au dérèglement climatique ? Voilà encore une attaque que l’on entend trop souvent au sujet de nos aînés. Et pourtant, les vieux font partie de la tranche de la population la plus encline à changer ses comportements de consommation, selon un sondage réalisé par la société d’études de marché BVA, commandé par la Banque européenne d’investissement, et publié sur le site de La Croix :
- 28 % des plus de 65 ans ont déjà réduit leur consommation de viande rouge contre 24 % des adultes de 30 à 64 ans,
- 41 % des plus de 65 ans achètent des produits locaux ou de saison contre 29 % des jeunes de 15 à 29 ans,
- 47 % des plus de 65 ans ne se disent pas prêts à renoncer à leur voyage de rêve (gros consommateur de carbone) contre 54 % des jeunes de 15 à 29 ans,
- 95 % des plus de 65 ans recourent au tri sélectif ou renoncent au sac plastique, contre 82 % des plus jeunes.
Les transports publics restent le domaine le plus plébiscité par les jeunes. 34 % des 15-29 ans les préfèrent à la voiture, contre 24 % des 65 ans et plus. Une donnée qui s’explique peut-être par le manque d’accès des transports publics pour les personnes les plus âgées et/ou les plus isolées.
6. À part leur santé, les personnes âgées n’ont pas vraiment de problème
La santé est l’un des sujets qui inquiète le plus les Françaises et les Français, notamment depuis la pandémie. Mais les problématiques de santé ne sont pas les seuls défis auxquels doivent faire face les personnes âgées. L’isolement est aussi un fléau qui touche de nombreuses personnes, qu’elles soient au top de leur forme physique ou pas.
En France, 2 millions de personnes âgées de plus de 60 ans n’ont aucun contact au quotidien. 530 000 se trouvent de leurs côtés en situation de “mort sociale”, c’est-à-dire qu’elles ne rencontrent jamais d’autres âmes humaines, indique le dernier baromètre des Petits Frères des Pauvres. Un chiffre en progression qui inquiète l’association qui continue de lutter contre l’isolement de nos aînés. Car les conséquences de cet isolement sont nombreuses : troubles du sommeil, hypertension, augmentation du stress, dépression, baisse du sentiment de bien-être, fragilisation du système immunitaire, déclin des fonctions cognitives… D’où la nécessité pour les tranches d’âge plus jeunes de s’engager auprès des personnes âgées et de faire fi des préjugés à leur encontre.
Publié le 20 mai par POSITIFR