Près de Dijon, les générations se croisent, se mêlent et s'entraident

Publié le par Orgris

  Maryse et Annie sont concentrées. Feuilles, paillettes, colle... Tout est à portée de main pour fabriquer des boules de Noël. "Les pointes des feutres sont trop grosses et j'ai fait un AVC (accident cardio-vasculaire) il y a trois ans, mais j'essaye quand même", explique Maryse en s'appliquant. Annie, elle, a déjà fini sa première boule, bordée d'étoiles bleues. A 72 et 65 ans, elles partagent la même occupation que la bande d'enfants venus du centre aéré d'à côté.

En cette fin du mois de décembre 2011 à Saint-Apollinaire (Côte-d'Or), le quartier "Générations" organise une activité intergénérationnelle telle qu'il en existe depuis dix ans.

Le quartier Générations est un petit miracle. Rien de très visible au premier abord : il s'agit de six bâtiments disposés sur une esplanade d'une partie résidentielle de la banlieue de Dijon. Mais ce lieu a été imaginé pour que toutes les générations puissent vivre ensemble autour d'un espace où les voitures ne peuvent circuler. Les portes des immeubles donnent d'ailleurs toutes vers l'intérieur du parc pour favoriser les contacts. Et un système d'interphones permet aux habitants de communiquer gratuitement.

Un quartier unique en France : les 76 logements sociaux accueillent à proportion égale des plus de 60 ans et des familles avec enfants de moins de 5 ans. Et tous signent une charte de respect et d'entraide. Une crèche et une halte-garderie rabaissent encore la moyenne d'âge. Aidée par l'école primaire voisine qui y a son réfectoire. Et deux petites unités de vie chaleureuses, ressemblant à des maisons, accueillent des personnes physiquement dépendantes pour l'une, des malades atteints d'Alzheimer pour l'autre.

Des lieux humains, "où les personnes sont accompagnées jusqu'à la fin", explique Pierre-Henri Daure, directeur des établissements de l'association Fedosad qui a imaginé ce concept. " Les horaires sont libres : les personnes se lèvent quand elles veulent, les familles leur rendent visite à volonté", note James Bontemps, directeur de ces deux structures. "Lors d'un décès, les veillées se passent dans la chambre, où tout le monde peut se recueillir, comme avant."

     "RESTRICTIONS DE CRÉDIT"

Il existe bien des projets immobiliers à Rennes, Lyon, Paris, mais cela se limite souvent à une construction. Pourquoi une telle exception ? Générations a été imaginé en 1997 par trois amis, Michel Thiry, président de la Fedosad, association de services à domicile, Rémi Delatte, alors maire de Saint-Apollinaire, et René Force, président de l'OPAC (office public d'aménagement et de construction) de Dijon. "Il y a eu une implication des élus et des gens de terrain, sans enjeux de pouvoir, ni clan", se souvient Michel Thiry.

Cette expérience cumulée de dix ans, les trois entités fondatrices auraient bien voulu la reproduire sur Atout'âge, un autre projet de la ville pour 2012. Mais la partie hébergement avec lits médicalisés - les fameuses unités de vie - n'a pas été retenue "à cause des récentes restrictions de crédit ", précise M. Thiry, la réforme de la dépendance, annoncée comme chantier prioritaire par Nicolas Sarkozy en décembre 2010 ayant été depuis... reportée. Le quartier Atout'âge n'accueillera donc pas de personnes dépendantes. Rendant l'aventure Générations encore plus exceptionnelle.

Laure Belot, Saint-Apollinaire (Côte-d'Or) Envoyée spéciale -

   Article paru dans l'édition du 17 janvier de : Logo-Le-Monde-N-B-.jpg

Publié dans Inter Génération

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