Une assurance obligatoire pour financer la dépendance

Publié le par Orgris

Un rapport pointe le coût et l'injustice des niches fiscales consenties aux seniors          

Lorsque s'amorce la réflexion sur le financement de la dépendance, enjeu majeur des années à venir, le Conseil d'analyse stratégique (CAS) prône une remise à plat des différentes mesures fiscales et sociales dérogatoires dont bénéficient aujourd'hui les « seniors » - les plus de 65 ans.

Pour cet organisme de prospective, rattaché au premier ministre, il convient de « rationaliser » ces exonérations et allégements d'impôts afin « de rendre plus juste la fiscalité des seniors et de financer la dépendance, au moins en partie ».

« La montée en charge progressive et attendue des dépenses de dépendance appelle à un redéploiement progressif et suffisamment anticipé d'une partie de ces dépenses » fiscales et sociales insiste le CAS dans une note intitulée « La fiscalité des seniors ».

Cette note figure dans le rapport, « Vivre ensemble plus longtemps », remis le 6 juillet à la secrétaire d'Etat chargée de la prospective, Nathalie Kosciusko-Morizet. Le CAS y rappelle que les dépenses de prise en charge de la dépendance vont augmenter « d'ici à 2025 d'environ 10 milliards d'euros ». Il précise que « les dispositions fiscales dérogatoires en faveur des seniors » représentent « un coût total supérieur à 11 milliards d'euros ».

Le CAS s'est tout d'abord penché sur le niveau de vie des personnes âgées de plus de 65 ans. Il en est arrivé à la conclusion que celui-ci « est sensiblement le même que celui des moins de 65 ans ». Sauf aux deux extrêmes de l'échelle des revenus : « les seniors les plus pauvres sont moins pauvres » que les plus pauvres des actifs et « les seniors les plus riches sont un peu plus riches » que les plus riches des classes actives, souligne l'étude.

L'organisme, qui note que le taux de pauvreté des seniors est d'environ 10 %, soit « 2 à 3 points » de moins que celui de l'ensemble de la population, considère par ailleurs qu'avec l'allongement de la durée de vie et la revalorisation des retraites avec l'inflation, le « niveau de vie relatif de retraités par rapport aux actifs » pourrait connaître « une dégradation » dans les années qui viennent.

     Répartir autrement l'impôt

Passant en revue les allégements et exonérations sur la CSG, la CRDS, l'impôt sur le revenu, la taxe d'habitation, la taxe foncière... dont bénéficient les seniors, ainsi que leur coût et leur efficacité, le CAS conclut que, si « certaines dispositions semblent particulièrement efficaces pour aider les personnes les plus en difficulté », « la redistribution intragénérationnelle » à laquelle ces dispositifs devraient contribuer n'est « pas efficace ».

L'étude insiste sur le fait qu'« une proportion importante de ces dépenses fiscales profite » aux seniors les plus riches : en l'occurrence ceux « appartenant au cinquième de la population française la plus aisée ».

A ce titre, sont notamment montrés du doigt le crédit d'impôt pour équipements pour les personnes âgées ou handicapées, la réduction d'impôt pour les dépenses d'accueil dans un établissement pour personnes dépendantes, ou encore l'abattement de 10 % sur les pensions de retraite intégré dans le calcul de l'impôt sur le revenu.

Pour le CAS, « nombre de ces dispositifs » contribuent « à renforcer les inégalités plutôt qu'à les réduire ». C'est pourquoi il invite à un redéploiement. Précisant qu'il ne s'agit pas de proposer des économies en termes de dépenses fiscales, il invite plutôt à « rationaliser » ces dispositifs fiscaux dérogatoires et, surtout, à « répartir autrement et de manière plus juste, l'effort fiscal ». L'organisme de prospective laisse aux pouvoirs publics le soin de décider ce qu'il faudrait faire.

Philippe Le Cœur Article paru dans l'édition du 20.07.10 duMondeLogo-Le-Monde-N-B-.jpg

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