L'accueil familial social, présenté par Bisma
L'accueil familial social
(Bimsa 82)
Pour les personnes âgées et les adultes en situation de handicap, l'accueil familial constitue une alternative intéressante entre le maintien à domicile et la prise en charge par une institution. .
Si l’accueil familial présente l’avantage d’élargir la palette de l’offre, principalement en milieu rural, cette formule d’hébergement individualisé peut surtout correspondre à un vrai choix de vie dans un cadre personnalisé, pour les accueillis, en même temps qu’à un choix professionnel et humain d’ouverture aux autres, pour les accueillants. Mais cette solution de proximité, qui participe au développement des territoires et de l’emploi, est encore bien mal connue et trop peu valorisée, aussi a-t-elle peine à décoller, voire à se maintenir. Elle répond pourtant à un besoin qui, lui, risque de s’accroître, notamment avec le vieillissement de la population.
Bisma a interrogé Jean-Claude Cébula, psychologue clinicien à l'Institut de formation, de recherche et d'évaluation des pratiques médico-sociales (Ifrep), spécialiste de l’accueil familial.
- L'accueil familial peut-il constituer une réponse aux besoins de prise en charge des personnes âgées ou handicapées ?
Jean-Claude Cébula : En complément du maintien à domicile et de l'accueil en institution, l'accueil familial élargit la palette des offres à destination des personnes âgées et des personnes handicapées. Si cette solution ne convient pas à toutes les situations, elle peut représenter une alternative de proximité, notamment pour les personnes en perte de lien. Les difficultés liées à l'âge, à la maladie ou au handicap créent souvent un vide relationnel que l'entourage social ou familial ne peut seul combler. Une famille d'accueil peut, mieux qu'un établissement où l'anonymat prédomine, contribuer à maintenir, parfois à restaurer, les capacités relationnelles de ces personnes.
Pourquoi ce dispositif reste-t-il encore marginal ?
J-C. C. : C'est un dispositif dont les pouvoirs publics n'ont pas jusqu'ici assuré une réelle promotion. Les législations successives concernant l'accueil familial ont donné lieu à des textes d'encadrement visant à régulariser des échanges financiers et à disposer de moyens permettant de contrôler l'initiative de particuliers. L'objectif affiché n'a jamais été d’instaurer l'accueil familial en tant que dispositif social intégré dans une palette d'offres diversifiées et complémentaires pour la prise en charge des personnes en manque d'autonomie. De leur côté les élus locaux, dans leur politique sociale en faveur des personnes âgées ou handicapées, ont souvent préféré mettre l'accent sur les établissements, réalisations visibles auprès de leurs administrés alors que les familles d'accueil se fondent dans le paysage social et économique. Du fait de ce manque de valorisation, ce dispositif a été peu relayé par les média grand public et reste peu connu des utilisateurs potentiels. Par ailleurs, la précarité du statut des accueillants familiaux qui exercent une activité contraignante et difficile n'a pas incité au développement des vocations. On compte environ 9.200 accueillants familiaux en France en 2006, un chiffre infime si on le compare aux 600.000 places proposées par les seuls établissements pour personnes âgées. Il s'agit d'une population dont la moyenne d'âge augmente et qui se renouvelle très peu.
Comment susciter l'essor de l'accueil familial ?
J-C. C. : Cela passe d'abord par une reconnaissance de l'activité. Actuellement les familles d'accueil sont confinées dans un statut hybride qui définit une activité libérale en partie salariée, en partie contractuelle et en partie commerciale. Cette solution bâtarde a été retenue afin de minimiser les coûts de l'accueil familial. Cette solution s'avère d'autant plus inacceptable que la définition légale de ce travail ne retient que des contraintes lourdes et le place sous surveillance. Ainsi la nécessité d'assurer la continuité de l'accueil n'est compensée ni par des dispositions réalistes permettant aux familles d'accueil de bénéficier de temps de repos indispensable, ni par des niveaux de rémunération satisfaisants. Enfin le paradoxe de leur statut est renforcé par le suivi et le contrôle que doivent accepter les familles d'accueil, interventions inadéquates et mal vécues d'autant que, maîtres d'œuvre de leur travail et face à sa complexité, les familles demandent plutôt aide et soutien. Il est donc nécessaire de sortir de ce flou juridique et d'explorer la voie du salariat. Parallèlement à la reconnaissance de l'activité, il est primordial de l'inscrire dans un dispositif institutionnel identifié « accueil familial » en complément des autres dispositifs de prise en charge existants. L'accueil familial ne peut dépendre de la seule mobilisation de particuliers. Il exige un cadre cohérent et organisateur dans lequel des familles d'accueil ne sont pas désignées comme les seules à gérer les différents besoins des accueillis mais travaillent en réseau avec d'autres intervenants professionnels. L'appartenance des familles d'accueil à un dispositif social institutionnalisé est une condition de la qualité d'un projet qui demande à être évalué, préparé, accompagné et suivi. Cette institutionnalisation permettrait également aux familles naturelles d'envisager avec moins de culpabilité qu'actuellement le placement familial de leur parent dépendant.
Propos recueillis par Nicole Nolfo
Source : CCMSA - Communication Bimsa
Mis à jour le : 26-05-2008 publié le : 29-05-2008