LES PARTENAIRES SOCIAUX S’ACCORDENT SUR L’EMPLOI DES SENIORS ET L’ASSURANCE CHÔMAGE

Publié le par Or gris : seniors acteurs des territoires, dans une société pour tous les âges

Les négociations sur l’emploi des séniors et l’assurance chômage ont finalement abouti à trois textes soumis à signature. 
Au terme d’une négociation marathon, syndicats et patronat sont parvenus à s’entendre sur les nouvelles règles d’assurance chômage et de conclure sur l’emploi des seniors – deux accords distincts mais intimement liés, qui leur permettent de reprendre la main sur les règles après une période de gestion unilatérale de l’État en cours depuis 2019. 
Auxquels s’est ajouté un troisième texte relatif à l’évolution du dialogue social, actant la suppression de la limite des 3 mandats successifs des représentants du personnel dans les CSE pour les entreprises d’au moins 50 salariés (nécessitant une transposition législative).

Trois textes, dont chacun à son niveau, démontrent que le dialogue social, dès lors qu’on lui laisse toute sa place, porte ses fruits. Au total, les partenaires sociaux ont estimé avoir répondu à la demande de la ministre du Travail de faire des économies, et de tenir leurs engagements de novembre 2023 de négocier un avenant qui décale les bornes d’âge pour entrer dans les dispositions spécifiques d’indemnisation seniors. Un compromis qui prévoit une réforme des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi seniors, en cohérence avec le décalage de l’âge légal de départ à la retraite de 64 ans, ainsi que des mesures d’économies principalement sur les frontaliers pour répondre aux objectifs fixés par la ministre du Travail.

Les organisations syndicales signataires, CFDT - CFTC et FO, se félicitent de la conclusion de cet avenant, qui permet la concrétisation des principales mesures de l’accord de novembre 2023 restées sans effets, et de protéger les demandeurs d’emploi face aux velléités maintes fois exprimées par les responsables politiques de faire de l’assurance chômage une variable d’ajustement des équilibres budgétaires en durcissant arbitrairement les règles de l’assurance chômage.

L’avenant Assurance chômage

L’accord conclu par les partenaires sociaux prend la forme d’un avenant qui reprend les dispositions du protocole d’accord et de la convention de novembre 2023 prévoyant :

  • Une diminution des conditions d’accès à l’assurance chômage à 5 mois pour les primo demandeurs d’emploi (essentiellement des jeunes et des femmes) et les saisonniers,
  • Une légère révision, plus favorable aux demandeurs d’emploi précaires, du calcul du salaire journalier de référence qui permet de déterminer le montant de l’allocation journalière,
  • La limitation de la dégressivité des hautes allocations à 55 ans (contre 57),
  • Plus d’équité entre demandeurs d’emploi, en limitant les effets d’aubaine de certains demandeurs d’emploi créateurs d’entreprise.

L’avenant soumis à signature concrétise également l’engagement pris de compléter l’accord initial par une évolution des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi seniors, en cohérence avec le décalage de l’âge légal de départ à la retraite de 64 ans en faisant évoluer celles-ci pour les salariés expérimentés, par les dispositions suivantes :

  • Un décalage de 2 ans des bornes d’âge pour l’entrée dans la filière sénior (ouvrant droit à une durée d’indemnisation plus longue) ;
  • 22,5 mois d’indemnisation maximum pour les allocataires âgés de 55 et 56 ans à la date de fin du contrat de travail (au lieu de 53 et 54 ans) ;
  • 27 mois d’indemnisation maximum pour les allocataires âgés de 57 ans et plus à la date de fin du contrat de travail (au lieu de 55 et 56 ans) ;
  • Pour les allocataires de 55 ou 56 ans en formation, un allongement de la durée d’indemnisation à 27 mois (réservé aux allocataires de 53-54 ans aujourd’hui) ;
  • Un décalage progressif de l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible pour un allocataire jusqu’à obtention des conditions de liquidation de sa retraite à taux plein.

Un compromis qui concrétise l’engagement des partenaires sociaux à réaliser 440 millions d’euros d’économies, sur la filière séniors, la mensualisation des allocations chômage, la mise en place d’un groupe de travail technique sur le bonus-malus avec la baisse programmée de la cotisation employeurs, des mesures d’économies supplémentaires à réaliser, principalement sur les frontaliers pour répondre aux objectifs.

  • Mesures sur les frontaliers 

Elles concernent les demandeurs d’emploi résidant en France et ayant travaillé dans un État limitrophe – principalement la Suisse et le Luxembourg et, dans une moindre mesure, l’Allemagne, la Belgique et l’Espagne.
En vertu d’un accord européen de réciprocité, les travailleurs résidents en France qui perdent leur emploi dans les pays cités précédemment, sont pris en charge par l’assurance chômage française - l’inverse est vrai pour les résidents qui vivent de l’autre côté de nos frontières et qui sont licenciés dans l’Hexagone. Le problème étant que le différentiel des salaires pratiqués dans les différents pays, par exemple la Suisse ou le Luxembourg, joue en défaveur de l’assurance chômage française avec un surcoût lié aux demandeurs d’emploi frontaliers estimé à 800 millions d’euros l’an dernier.

Dans l’attente d’une modification de textes européens (à long terme et sans certitude) sur lesquels les partenaires sociaux n’ont pas la main, et dans l’objectif de limiter les effets importuns de l’indemnisation de ces demandeurs d’emploi, l’accord prévoit :

  • L’application de coefficients réducteurs qui conduiront à une baisse du montant de leurs allocations chômage perçues en France ;
  • Un accompagnement et un suivi des frontaliers par l’opérateur France Travail, ainsi que la définition d’une nouvelle offre raisonnable d’emploi spécifique (une disposition qui nécessite sa création par décret).

Deux mesures qui devraient permettre 1,4 milliard d’euros d’économies sur quatre ans.

  • Concernant la baisse de la cotisation patronale

Celle-ci elle reportée de 4 mois, elle ne sera effective qu’au 1er mai 2025, (au lieu du 1er janvier).
Le groupe de travail prévu sur le bonus-malus devra finaliser ses travaux avant le 31 mars 2025.

Au total, cet avenant à l’accord initial devait permettre, selon les services techniques de l’Unédic, de réaliser 2,5 milliards d’économies sur 4 ans (2025-2028)
Selon toute vraisemblance, cette nouvelle convention d’assurance chômage devrait être agréée par le Premier ministre avant la fin de l’année, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2025 (à l’exception des mesures nécessitant une transposition légale ou réglementaire).

Emploi des seniors, plusieurs avancées sont obtenues 

Du côté de l’emploi des seniors, le chemin semblait périlleux après l’échec de la négociation du Pacte de la vie au travail, du printemps dernier, mais le projet d’accord en faveur de l’emploi des salariés expérimentés trouvé le 14 novembre contient plusieurs avancées.

Pour les organisations syndicales, l’enjeu de cette négociation sur l’emploi des salariés expérimentés était de construire des droits nouveaux pour les travailleurs, afin de rendre plus soutenable les fins de carrière et, pour la CFDT, d’obtenir un accès élargi à la retraite progressive.

L’accord négocié comporte plusieurs avancées 

  • La négociation collective spécifique pour l’emploi et le travail des seniors, en branche et en entreprise 
    Afin d’améliorer le dialogue social dans les branches et les entreprises en ce qui concerne l’emploi des seniors, l’accord crée une négociation obligatoire spécifique tous les trois ans dans les branches professionnelles et les entreprises de plus de 300 salariés.
    Le texte liste les thèmes de cette négociation (le recrutement, la fin de carrière, la transmission des savoirs, la santé, etc.). À défaut d’accord, les entreprises seront encouragées à mettre en place un plan d’action seniors après consultation des élus du personnel.

Les thèmes facultatifs de cette négociation sont également largement renforcés, en intégrant le développement des compétences, l’accès à la formation, les politiques en matière de santé et de prévention des risques, l’organisation et les conditions de travail, les impacts des transformations technologiques et environnementales sur les métiers, les pratiques managériales, les modalités d’écoute des salariés, les relations sociales.

Il s’agit désormais d’une nouvelle négociation obligatoire dans les entreprises et les branches, distincte de la négociation sur la Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels (dont le thème facultatif de négociation sur l’emploi des salariés âgés est supprimé).

  • La retraite progressive dès 60 ans
    L’accès dès 60 ans à la retraite progressive (soit 4 ans avant l’âge légal de départ à la retraite, conditionné à une durée des cotisations inchangée de 150 trimestres) s’adresse à l’ensemble des salariés et contrairement aux dispositifs existants (temps partiel ou congés de fin de carrière) principalement dans les grandes entreprises, peut contribuer au maintien dans l’emploi des salariés expérimentés, en leurs permettant de réduire l’intensité du travail en fin de carrière.
  • L’entretien de mi- carrière et l’entretien de fin de carrière
    L’accord prévoit deux rendez-vous clés de mi-carrière et de dernière partie de carrière, dans le cadre des entretiens professionnels. 
    Le premier est organisé autour de la 45ème année du salarié et a pour ambition d’anticiper la seconde partie de la vie professionnelle et de prévenir les risques de perte d’employabilité. 
    Le second est organisé dans les deux années précédant le 60ème anniversaire du salarié, et vise à aborder les conditions de maintien dans l’emploi et les possibilités d’aménagements de fin de carrière, dont la retraite progressive.
  • Un CDI de valorisation de l’expérience (CDI seniors) pour les demandeurs d’emploi à partir de 60 ans, encadré, sous forme d’une expérimentation qui sera évaluée.

Un nouveau contrat de valorisation de l’expérience (ou CDI senior rebaptisé) est créé à titre expérimental pour les demandeurs d’emploi de plus de 60 ans, et se substitue au CDD senior (créé en 2005 et très peu utilisé). Institué pour une durée de cinq ans, une évaluation de cette expérimentation aura lieu avant la fin de la 2ème année en vue de statuer

Les organisations syndicales signataires estiment que les compromis trouvés sur ces accords sont porteurs d’avancées pour les salariés et les demandeurs d’emploi, et marquent la volonté commune des partenaires sociaux de reprendre la main sur les règles de l’assurance chômage, et de démontrer l’importance de la démocratie sociale dans son apport à la construction de l’intérêt général.


Sources : Protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage tel que modifié par l’avenant du 14 novembre 2024  ; https://www.aefinfo.fr/assets/medias/documents/5/5/551258.pdf

Accord national interprofessionnel du 14 novembre 2024 en faveur de l’emploi des salariés expérimentés :  https://www.aefinfo.fr/assets/medias/documents/5/5/551096.pdf

Projet d’accord national interprofessionnel du 14 novembre 2024 relatif à l’évolution du dialogue social : https://www.aefinfo.fr/assets/medias/documents/5/5/551103.pdf

Publié le 30 novembre 2024 par Clés du Social

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