La Convention citoyenne sur la fin de vie commence ses travaux
173 citoyens entament la phase de « rencontre et d’appropriation de leur mission » : débattre et rendre des conclusions sur la manière d’accompagner la fin de vie en France.
DÉBAT - Ils ne sont pas 150 mais 173 citoyens pour l’ouverture de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui démarre vendredi 9 décembre au palais d’Iéna à Paris, siège du Conseil économique, social et environnemental (Cese). La mission de ces Français qui ont été tirés au sort est de débattre et d’apporter une réponse à cette question : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? » manière d’accompagner la fin de vie en France.
Âgés de 18 à 87 ans, ces citoyens pourraient être prochainement rejoints par d’autres. « Nous avons reçu 173 dossiers finalisés, il pourrait y en avoir plus, a détaillé Claire Thoury, présidente du comité de gouvernance de la Convention, lors d’un point presse. Nous avons fait le choix de tirer au sort davantage de citoyens pour être sûrs d’en avoir 150 à la fin du processus, si jamais il y a des incidents et que certains doivent arrêter. »
Parmi eux, 54 % d’hommes et 46 % de femmes. « Tous les âges, tous les niveaux de diplômes, toutes les catégories socioprofessionnelles, toutes les régions sont représentées », souligne la présidente, précisant que le panel compte aussi « des personnes issues des territoires ultramarins et huit femmes en situation de grande précarité ». Ces dernières étant difficiles à démarcher par téléphone, elles ont été sélectionnées avec l’aide de l’ONG ATD Quart-Monde.
Les citoyens seront bien entendu logés, nourris et défrayés pour leur présence, avec une indemnité de 94 € bruts par jour en cas de perte de salaire et la possibilité de bénéficier d’une aide pour la garde d’enfant.
Une première session de trois jours
Cette première session de travail dure jusqu’au dimanche 11 décembre. Neuf sessions sont ainsi prévues, ce qui correspond à 29 journées de travail, étalées sur trois mois et demi. Si l’issue de la Convention est encore inconnue, sa date de fin est prévue le 19 mars.
Ce vendredi, les citoyens ne seront pas accueillis par Emmanuel Macron, à l’initiative de cette Convention qu’il avait annoncée le 13 septembre dernier. C’est sa première ministre, Élisabeth Borne, qui a saisi le Cese en septembre en lui confiant la mission de piloter la convention citoyenne sur la fin de vie, qui viendra prononcer un discours d’ouverture. Pour autant, l’exécutif n’est pas impliqué dans l’organisation de la Convention.
Cette première phase de travail, dite de « rencontre et d’appropriation de la mission », occupera les deux sessions de décembre, l’autre étant prévue du 16 au 18. En groupe, les participants prendront connaissance d’un socle d’information et de connaissances mis au point par le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), organisme public sous l’autorité du ministère de la santé.
Premières auditions et tables rondes
Il comporte de la documentation, des fiches expliquant les termes clefs du débat, le cadre législatif existant, des chiffres et des infographies sur le sujet, sur les législations étrangères, les traitements médicamenteux… Ce pack d’informations – qui sera disponible en accès libre sur un site Internet mis en ligne dans les prochaines heures — est aussi composé d’auditions vidéos, de témoignages et d’œuvres de fiction.
Lors de ce premier week-end, les citoyens pourront assister à une première audition, celle de l’ancien député Alain Claeys, coauteur de la dernière loi de 2016 sur la fin de vie, qui fera une présentation du cadre légal en vigueur. Une table ronde d’experts internationaux permettra d’expliquer les systèmes existants ailleurs. Samedi, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, exposera aux participants les enjeux législatifs.
Lors du second week-end de décembre, dont le déroulé précis n’est pas encore fixé, sont prévus des échanges avec des soignants (médecins, infirmiers, aides-soignants) et des représentants des cultes et grands courants de pensée. Autant d’éléments pour permettre aux citoyens de s’imprégner du sujet et de le comprendre avant d’entrer dans la seconde phase, celle de la délibération, qui courra de janvier à février.
« Éviter la polarisation, la frustration et la colère »
Le programme de janvier et février sera élaboré en concertation avec les citoyens, qui pourront eux-mêmes faire des propositions de personnes à auditionner, « soumises au comité de gouvernance, qui devra s’assurer de la pluralité des points de vue exprimés ». Et qui auront l’opportunité également d’émettre le souhait de visiter des lieux ou des pays pour affiner leur jugement.
Une cellule psychologique sera activée tout le long de la Convention, sur une thématique qui pourrait s’avérer « difficile » pour certains. « On a besoin d’aller au bout de ce débat sur la fin de vie, de prendre le temps d’avoir un débat apaisé et serein, tant sur le fond que sur la forme, a rappelé Claire Thoury. Il ne s’agit pas de dire que certains ont tort et que d’autres ont raison. » Les délibérations sont d’ailleurs ouvertes au public et les auditions diffusées en direct. Avec toujours pour objectif : « éviter la polarisation, la frustration et même la colère » sur un sujet hautement sensible.
À l’issue de ces travaux, impossible d’anticiper la forme que prendra leur restitution le 19 mars, ou comment seront adoptées (référendum, Parlement...) les éventuelles modifications législatives. Afin d’éviter toute éventuelle déception comme à l’issue de la Convention climat, la présidente a rappelé que l’exécutif s’était engagé à répondre aux propositions des citoyens. « Mais ce ne sont pas les citoyens qui vont faire la loi, a insisté Claire Thoury. À la fin, c’est l’exécutif qui fera ce qu’il a à faire en fonction de la manière dont aura été alimenté ce débat national. »
Lucie Hennequin publié le 9 décembre sur le Huffingtonpost