Aidants - Avec la sélection des candidats, l'expérimentation du baluchonnage va se concrétiser
Un décret fournit la liste des établissements et services qui pourront participer à l'expérimentation du "baluchonnage" ou "relayage". Leurs salariés pourront, dans des conditions strictement encadrées, assurer des prestations de suppléance au domicile du proche aidant d'une personne nécessitant une surveillance permanente.
Un décret du 26 avril 2019 fixe la liste des séjours de répit aidants-aidés autorisés à mener l'expérimentation du "baluchonnage" ou "relayage", marquant ainsi la concrétisation d'une démarche annoncée il y a dix-huit mois (voir notre article ci-dessous du 6 décembre 2017). La liste comporte pas moins d'une trentaine d'établissements et services : principalement des Ehpad, mais aussi des structures pour adultes et enfants handicapés, comme des Sessad (services d'éducation spéciale et de soins à domicile), des Samsah (services d'accompagnement médicosocial pour adultes handicapés), des FAM (foyers d'accueil médicalisés) ou des IEM (instituts d'éducation motrice). Toutes ces structures ont été sélectionnées à l'issue d'un appel à candidatures national
Une dérogation au droit du travail et aux dispositions conventionnelles
Cette expérimentation d'une durée de trois ans s'inspire du baluchonnage pratiqué de longue date au Québec et consistant, pour le salarié d'un établissement ou d'un service médicosocial, à remplacer l'aidant familial au domicile de la personne aidée, lui assurant ainsi une période de répit afin d'éviter une situation d'épuisement. L'expérimentation est prévue par l'article 53 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (Essoc). Sa mise en œuvre a fait l'objet d'un décret du 28 décembre 2018, qui en précise les modalités et en fixe le cahier des charges.
En pratique, le recours à la loi s'est révélé indispensable car le baluchonnage suppose des dérogations au droit du travail, "en vue d'effectuer des prestations de suppléance à domicile du proche aidant d'une personne nécessitant une surveillance permanente, ou lorsqu'ils réalisent ces prestations en dehors du domicile dans le cadre de séjours dits de répit aidants-aidés". Ces dérogations au code du travail et/ou aux dispositions conventionnelles des organismes concernés tiennent compte du fait que le salarié de l'établissement ou du service assurant le "baluchonnage" ou "relayage" vit au domicile de la personne aidée et assure donc une présence permanente. Elles portent notamment sur les régimes d'équivalence, les temps de pause, les durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail, les durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail de nuit et sur la durée minimale de repos quotidien.
Des exceptions très encadrées
Ces dérogations sont toutefois très encadrées. La durée d'une intervention au domicile d'une personne aidée ou en dehors du domicile dans le cadre des séjours dits de répit aidants-aidés ne peut ainsi excéder six jours consécutifs.
De même, le nombre de journées d'intervention ne peut excéder, pour chaque salarié, un plafond de 94 jours, apprécié sur chaque période de douze mois consécutifs. Enfin, la totalité des heures accomplies pour le compte des établissements ou services expérimentateurs par un salarié ne peut excéder un plafond de 48 heures par semaine en moyenne, apprécié sur chaque période de quatre mois consécutifs. Pour l'appréciation de ce plafond, l'ensemble des heures de présence au domicile ou en établissement, ou sur le lieu de vacances lorsqu'il s'agit des séjours dits de répit aidants-aidés, est pris en compte.
En outre, les salariés bénéficient au cours de chaque période de vingt-quatre heures d'une période minimale de repos de onze heures consécutives (qui peut toutefois être réduite ou supprimée). L'intervention ouvre aussi droit à un repos compensateur équivalent aux périodes de repos et de pause dont les salariés n'ont pu bénéficier, et qui peut être accordé en partie pendant l'intervention ou à l'issue de celle-ci, déduction faite de la durée du repos accordée le cas échéant pendant l'intervention.
Comme il est de règle, l'article 53 de la loi Essoc prévoit une évaluation au terme de l'expérimentation. Celle-ci s'appuiera sur des rapports d'évaluation établis, selon les cas, par le président du conseil départemental ou par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS). Le gouvernement remettra alors au Parlement, au plus tard six mois avant l'échéance de la période d'expérimentation, un rapport global d'évaluation, qui devrait déboucher sur la pérennisation du dispositif.
Jean-Noël Escudié / P2C pour Localtis, 2 mai 2019
Références : Décret n°2019-372 du 26 avril 2019 fixant la liste des séjours de répit aidants-aidés autorisés à mener l'expérimentation prévue à l'article 53 de la loi n°2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (Journal officiel du 28 avril 2019) |