Guitare électrique en mains, les mamies s’éclatent à Toulouse
Sept femmes de 61 à 78 ans dépoussièrent l’image de la grand-mère. A Toulouse, elles participent cette semaine à un atelier de création artistique autour de la guitare électrique et de l’écriture.
Le nom de mamies guitares leur va comme un gant. Cet atelier de performance artistique, auquel participent depuis lundi à Toulouse (Haute-Garonne) sept retraitées, est encadré par le guitariste Mathieu Sourisseau et le journaliste et metteur en scène Guillaume Malvoisin. Le matin, les seniors lisent les textes qu’elles ont écrits la veille, chez elles, sur un thème donné.
« L’amour n’est pas celui qui nous a le plus inspirées, c’est plutôt le cri », lâche Eliane. Elle est venue participer à l’atelier sous les conseils de son amie Christiane, puis elle a convaincu Monique, la plus âgée du groupe (78 ans) et Christine, sa voisine, grand-mère de huit petits-enfants. « Je fais un travail de collecte de la parole en prise directe », explique Guillaume Malvoisin.
L’après-midi, assises en arc de cercle sur la scène, elles tiennent leur guitare électrique. A leurs pieds, des grattoirs, des pailles en fer et des tissus, leur permettent de créer du son à partir des consignes données. Elles font glisser une ampoule le long du manche, puis accrochent les cordes avec l’embout métallique de l’objet. « Je désaccorde les guitares pour que les non-musiciennes puissent faire sonner l’instrument plus facilement. L’avantage qu’elles ont, par rapport aux musiciens, est de savoir faire n’importe quoi », souligne Mathieu Sourisseau.
Musique expérimentale
A l’initiative du projet, il a inventé une gestuelle imagée pour diriger le groupe. Une musique expérimentale s’échappe. Concentrées, les mamies ont le sourire.
Elles se charrient mais, mine de rien, abordent la contraception, le droit à l’avortement et la libération sexuelle, qu’elles ont toutes vécus dans les années 1970. « J’avais fait un peu de guitare classique, mais elle était cachée chez moi. J’écris, je chante, et je me suis mise au slam. Ce qui me plaît ici, c’est qu’on a toutes des âges différents, mais la parole est libérée », assure Monique.
Plusieurs mamies font du bénévolat. « Je fais du théâtre depuis deux ans. J’ai eu envie de me jeter à l’eau. Je déteste les clubs seniors », lance Marie-Claude, militante LGBT. Martine, jeune retraitée bibliothécaire et ancienne militante syndicale, ne connaissait personne en arrivant. « Après une rupture amoureuse, où on m’a traitée d’extravagante, j’ai décidé d’y aller. » L’atelier a déclenché chez Christiane l’envie d’écrire. Maïté, elle, avait participé à un atelier similaire il y a deux ans, à Roques-sur-Garonne. « Ce groupe est moins coincé. On ose plus. On a parlé de nos règles, même si on ne les a plus ! »
« Le projet nous a tout de suite séduits, pour son côté intergénérationnel et l’envie de donner la parole aux femmes. Nous souhaitons le développer », explique la vice-présidente à la culture au conseil départemental, Anne Boyer. Une représentation publique gratuite est prévue vendredi soir à 20h30 à l’espace Roguet.
Armelle Parion dans Le Parisien le 17 janvier 2019.