Les freins à la mobilité accélèrent l’isolement social des personnes âgées
Renoncer à se déplacer est une des peurs des français à l’heure où nos facultés commencent à décliner. Difficile de leur donner tort puisque près de 50% des plus de 75 ans rencontrent des difficultés liées à la mobilité. Abandon de la voiture, complexification de l’espace urbain, méconnaissance des transports publics… Résultat : un senior sur trois affirme régulièrement ne pas sortir de chez lui pendant plus de 24 heures d’affilée.
Isolement social
De la dame âgée qui n’a jamais conduit, au vieux monsieur qui ne peut plus déchiffrer les panneaux de signalisation, nombreuses sont les personnes qui se retrouvent sans solution de transport au crépuscule de leur vie. Ils sont à peine 5% à utiliser les transports en commun pour se déplacer. « Une incapacité qui conduit les personnes âgées à développer une vision négative d’eux-mêmes et à se considérer comme un fardeau pour la société. Ce qui les expose aussi au risque de dépression » alerte Valérie Dreyfuss, déléguée générale du Laboratoire de la Mobilité inclusive. « Dans une société vieillissante où le lien familial constitue une ressource essentielle pour les plus fragiles, il est temps de déterminer vers quelle société nous souhaitons aller », s’insurge-t-elle. Car dès 2020, plus d’un tiers de la population sera âgé de plus de 60 ans. C’est pourquoi offrir la capacité à chacun de rester mobile et indépendant apparaît comme un enjeu de santé publique.
De nombreux freins à la mobilité des seniors
Selon une étude du Laboratoire de la Mobilité inclusive, les difficultés que vivent les personnes âgées au moment de se déplacer sont diverses. Chez les plus de 60 ans, c’est le niveau de vie qui influe le plus sur la mobilité. En effet, la moitié des plus de 75 ans ont un revenu inférieur à 958€ par mois. Viennent ensuite les difficultés géographiques : insuffisance ou inadaptation du mobilier urbain, difficulté de cheminement sur les trottoirs, accessibilité des transports publics… Puis les difficultés sociales : isolement, perte d’autonomie ou encore physiologiques : manque d’équilibre, marche difficile. Ce sont donc à la fois les infrastructures, les offres de transports, la conception de nos habitats, qu’il est essentiel de repenser pour les adapter à cette nouvelle tranche de vie.
Continuer à être autonome
Afin d’assurer un apprentissage de la mobilité tout au long de la vie, l’association Wimoov propose un dispositif de formation pour les particuliers à travers ses 27 plateformes de mobilité réparties sur le territoire. Tout commence par un entretien individuel qui permet de cerner les difficultés : ignorance des offres de transport publics ou angoisse vis-à-vis d’une aventure de transport qui leur apparaît périlleuse…
Grâce à cet état des lieux, les conseillers sont en mesure de guider les personnes fragilisées vers des solutions existantes. Pour cela, ils peuvent par exemple accompagner une personne âgée en lui montrant comment prendre le bus. Ils peuvent étudier avec elle les solutions pour se rendre au club senior ou chez leur médecin comme prendre le train ou remonter sur un vélo. Utiliser Google Maps, un GPS ou déchiffrer les horaires sur un panneau d’affichage sont autant de connaissances apprises ou réapprises par les 11.000 personnes suivies sur le territoire. « Grâce aux outils numériques nous espérons multiplier par trois le nombre de personnes suivies d’ici peu » indique Fabien Bénito, responsable de la thématique de la mobilité des personnes âgées au sein de Wimoov.
Covoiturage solidaire à la campagne
65% des seniors vivent dans les espaces ruraux et périurbains qui connaissent une très forte dépendance à la voiture. Or dans ces territoires, l’abandon de la voiture due à l’âge entraîne de lourdes conséquences. Pour que les personnes âgées puissent bénéficier des trajets des autres, la start-up Atchoum Atchoum a imaginé un système de covoiturage rural covoiturage rural qui repose sur les bonnes volontés. Les personnes âgées sollicitent une demande de covoiturage par simple appel téléphonique auprès d’une centrale de réservation, elle aussi solidaire. Les chauffeurs sont alors prévenus par notification SMS ou e-mail. Lorsque le trajet est accepté, la personne âgée est prévenue par téléphone. « Nous rencontrons un vrai succès auprès des jeunes retraités qui souhaitent dédier une partie de leur temps à leurs aînés » s’étonne Fabrice Leblon, co-fondateur et lui-même originaire d’un petit village entre Mulhouse et Belfort. « Les chauffeurs rendent service sans pour autant s’engager dans une démarche associative très chronophage ». En échange, ils touchent une indemnité de 35 centimes par km. « Mais pour eux ce n’est pas une question d’argent ». En effet, 80% des trajets à la campagne font moins de 3km. Une dizaine de mairies ont déjà été séduites par ce système qui s’avère très peu couteux. Environ 50€ par mois pour une commune de 2000 habitants.
Si la maîtrise des outils numériques ouvre des possibilités de mobilité inversée comme la télémédecine, les achats en ligne ou la livraison des repas… La capacité à sortir de chez soi semble seule capable de freiner la perte d’autonomie et d’encourager le maintien à domicile.
Sources : Etude sur le mobilité des seniors issue du Laboratoire de la Mobilité inclusive