ENVIE Autonomie 49 donne une seconde vie au matériel médical- Maine et Loire – 49-
« Quand les gens arrivent chez nous, c’est qu’ils n’ont plus d’autres solutions pour s’équiper. Pourtant un lit médicalisé, une aide à la marche, un fauteuil, c’est essentiel […] Envie peut contribuer à ce que moins de personnes soient mises sur le côté et en plus créer des emplois et développer une nouvelle activité sur les territoires. »
Philippe Robin, directeur d’ENVIE Autonomie 49.
Afin de faciliter l’accès aux aides techniques permettant de compenser une perte d’autonomie, ENVIE Autonomie 49, émanation de l’entreprise de recyclage et de réemploi ENVIE, a développé une filière de récupération, de reconditionnement et de distribution d’aides techniques. Collecté auprès d’établissements du secteur sanitaire et médico-social ou de particuliers, ce matériel est trié et remis à neuf, avant d’être revendu à 30% du prix du marché, à des personnes ne bénéficiant pas de prise en charge ou dont le reste à charge est trop élevé, ainsi qu’à des établissements s’équipant en matériel complémentaire. En employant des salariés en insertion professionnelle, ENVIE Autonomie permet également à des personnes très éloignées de l’emploi de retrouver une activité et d’être accompagnés dans leur parcours.
Envie est un réseau d’entreprises de l’économie sociale et solidaire présentes partout en France. Entreprise d’insertion par l’emploi, elle s’est spécialisée dans la récupération, le recyclage et le réemploi d’appareil électroménager. Depuis la création de la première entité à Strasbourg en 1984, le réseau s’est développé jusqu’à compter une cinquantaine de structures, dont celle d’ENVIE 49, créée en 1993. Si l’activité d’ENVIE s’est construite dans un premier temps autour de la récupération, de la remise en état, puis de la revente à des ménages modestes de petits et gros appareils d’électro-ménager, elle s’est depuis diversifiée, avec le recyclage des Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques, dans le cadre de la législation européenne de 2006.
ENVIE 49 est une des premières structures à avoir développée une nouvelle activité autour du recyclage et du réemploi des aides techniques pour les personnes en perte d’autonomie. Un matériel souvent couteux avec une prise en charge inégale et complexe et des difficultés de solvabilisation.
- Un matériel dont une grande partie est financée par des aides publiques mais qui devient rapidement obsolète et est peu réutilisé.
- Un marché relativement opaque et une clientèle captive.
ENVIE 49 entreprend alors la réalisation d’un diagnostic avec l’aide d’un ergothérapeute pour confirmer l’existence, qualitative et quantitative, d’un gisement d’aides techniques à récupérer et d’un potentiel besoin en matériel reconditionné. Une soixantaine d’établissements sanitaires et médico-sociaux du département, les acteurs institutionnels (Maison départementale de l’Autonomie, Caisse Primaire d’Assurance Maladie, Caisses de retraite…), les associations d’usagers et de services à domicile… sont sollicités. Ce diagnostic confirme qu’une telle l’offre peut intéresser un large public :
- Des personnes sans couverture sociale ou ne pouvant assumer le reste à charge.
- Des personnes dont la pathologie évolue rapidement et qui doivent changer fréquemment de matériel.
- Des aidants proches souhaitant s’équiper pour accueillir la personne chez eux.
- Des professionnels d’établissements qui souhaitent acquérir du matériel complémentaire pour leurs résidents dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint.
Fin 2014, l’activité est créée et en 2015, ENVIE Anjou est retenu, au côté de cinq Conseils départementaux, dans le cadre d’un appel à projet initié par la CNSA pour « identifier, faire émerger et contribuer à modéliser des pratiques innovantes relevant de la logique d’économie circulaire, et portant prioritairement sur les modes de distribution, de mise à disposition, de récupération et de recyclage des aides techniques. Cette reconnaissance de la CNSA a notamment permis de rassurer les fabricants nationaux et de normaliser les relations. Aujourd’hui, les techniciens d’envies peuvent bénéficier des formations produites et se fournir en pièces détachées.
Développement durable et réinsertion professionnelle
Le site de Trélazé est organisé autour d’une zone de stockage, d’un atelier de reconditionnement des aides techniques et d’une boutique. Huit équivalents temps plein sont mobilisés, soit trois permanents et deux techniciens (spécialistes des fauteuils roulants et de l’adaptation) qui assurent l’encadrement de six personnes en contrat d’insertion pour un maximum de deux ans, rémunérée au SMIC. Il s’agit de personnes au RSA, de jeunes non qualifiés ou de personnes ayant bénéficiées d’une reconnaissance de travailleurs handicapées, dont l’orientation a été validée par Pôle Emploi. ENVIE Autonomie les accompagne dans la construction de leur projet professionnel, le développement de nouvelles compétences, la résolution de leurs freins à l’emploi, avec un objectif de 60% de sortie positive du dispositif et pour 25% d’entre eux la signature d’un CDD ou d’un CDI dans les six mois suivants cette sortie. En 2017, parmi les personnes en insertion accompagnée au sein d’ENVIE Autonomie, deux ont signé un CDI avec des EHPAD, pour l’entretien du matériel médical, une est gardien d’immeuble, une autre est en formation et deux en recherche d’emploi. Au total, ce sont 25 emplois directs qui ont été créés
Favoriser l’accès de tous à des aides fiables
L’activité d’ENVIE Autonomie s’organise autour de la collecte, du reconditionnement et de commercialisation (vente ou prêt) du matériel.
Dans un premier temps, la collecte de matériel s’est faite surtout auprès des établissements sanitaires ou médico-sociaux (ESMS) pour personnes âgées et handicapées. Sur les trois premières années quelques 6500 aides ont été collectées, principalement des fauteuils roulants, des lits médicalisés, des lèves-personnes et des aides au soin et à la toilette. Cette source s’est aujourd’hui ralentie et ENVIE Autonomie cherche maintenant à développer la collecte auprès des particuliers, par un gros travail de communication vers les mairies, les CLIC, les professionnels de santé et paramédicaux. Cette collecte reposant sur le don, elle est effectuée gratuitement par ENVIE Autonomie, qui s’efforce cependant de la rationnaliser en organisant de points de regroupement avec les mairies ou des partenaires comme Emmaüs.
Une fois collecté, le matériel est trié sur le site de Trélazé. En 2015 et 2016, 35% du matériel récupéré a pu être rénové. Le temps de travail passé sur chaque aide est très variable selon l’aide et son état mais peut demander jusqu’à deux jours, entre le travail de nettoyage, la rénovation, l’aseptisation, les réparations éventuelles et la reprogrammation, comme dans le cas des fauteuils électriques. Le matériel reconditionné sera garantie par ENVIE Autonomie pendant un an, pièces et main-d’œuvre. La structure assure le service après-vente, tout comme la livraison, l’installation et si besoin les réglages des équipements. A Angers, Envie Autonomie s’appuie également sur un réseau d’ergothérapeutes pour procéder à l’adaptation du matériel en fonction des besoins de la personne, alors que d’autres sites, comme ceux de Nancy et Saint-Etienne disposent de la compétence en interne.
Les aides reconditionnées sont ensuite distribuées auprès des particuliers ou des professionnels, à part égale en 2017. Un premier contact se fait généralement par téléphone. Il permet de préciser le besoin, le type de matériel recherché, également d’informer les personnes sur leurs droits et de les orienter vers des structures ou dispositif. Un accueil est aussi réalisé à la boutique, avec la possibilité d’essayer l’aide ou d’effectuer une période de prêt avant l’acquisition. Les tarifs proposés sont équivalent à environ 30% du produit neuf. A titre d’exemple, sur un fauteuil électrique neuf vendu 15000 euros, il peut rester environ 8000 euros à la charge de la personne. Le même fauteuil d’occasion vendu par ENVIE Autonomie, sera facturé autour de 1600 euros.
Une démarche en voie de consolidation
Si le modèle développé par ENVIE Autonomie a prouvé son intérêt, il reste encore des freins à lever pour le généraliser et stabiliser son modèle économique.
Le principe de recyclage a bien progressé dans une partie de l’opinion publique, mais un effort de communication est encore nécessaire pour faire évoluer les habitudes de consommation sur un produit aussi spécifique que les aides techniques. Si localement les associations de personnes en situation de handicap ont bien compris l’intérêt d’un tel dispositif, des réticences subsistent au niveau des fédérations nationales qui craignent un service « au rabais ».
Or, le modèle économique d’ENVIE Autonomie est encore fragile et nécessite que l’activité se développe, avec une demande plus régulière et la fidélisation de la clientèle. En 2015, 60% des charges de la structure angevine étaient financées par son activité. Sur les charges de personnels, ENVIE Autonomie perçoit 10 000 euros d’aides par poste en tant qu’entreprise d’insertion agréée. Le reste provient d’un financement de la Conférence des Financeurs (150 000 euros sur deux ans) dans le cadre des appels à projets et d’aides ponctuelles apportées par des Fondations telles que la MACIF, la Fondation Legrand ou le Crédit Mutuel. La sécurité sociale ne s’est toujours pas prononcée sur une éventuelle prise en charge du matériel d’occasion.
Pour renforcer son impact et ses capacités de fonctionnement, le site d’Angers s’inscrit dans le développement d’un réseau ENVIE Autonomie, au niveau interrégional et national. Localement, l’ouverture à Rennes d’une structure identique à celle d’Angers et d’une autre prévue à Nantes, permet d’envisager une structuration de la collecte et du reconditionnement au niveau régional et une distribution par département en s’appuyant sur un réseau de partenaires. Au niveau national, la dizaine de sites ENVIE Autonomie existants ou en cours de création en 2018 (Angers, Rennes, Nancy, Saint-Etienne, Strasbourg, Nantes, Angoulême, Reims, Montbéliard, Lyon) devraient se structurer en réseau, afin de développer une politique commune en matière de prix, de communication, de process et de lobbying face aux mutuelles et à l’assurance maladie.
Impact(s) :
• Faciliter l’accessibilité aux aides techniques, notamment pour les personnes ne bénéficiant pas d’une prise en charge, mais également pour les établissements qui n’ont pas toujours la ressource en interne pour entretenir et gérer leur matériel.
• Encourager le développement de l’économie circulaire, dans une logique de développement durable.
• Permettre la réinsertion professionnelle de personnes très éloignées de l’emploi ou sans qualification, en les mobilisant sur une activité riche de sens et valorisante.
• Susciter une évolution du système de santé, en interpelant l’assurance maladie et les mutuelles.
Moyens Humains : 8 équivalents temps plein dont 6 contrats d’insertion
Contact action : Matthieu Martin responsable, Philippe Robin directeur |
Publié dans le lettre d’APRILES de mars 2018