Vent de révolte dans les résidences pour seniors
Résidences services seniors : Charges exorbitantes, services défaillants... Des propriétaires se retournent contre les promoteurs.
Le parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, vient d’accueillir, entre le 18 et le 21 mai, l’édition 2017 du Salon des seniors, un rendez-vous donné aux six millions de Français âgés de plus de 75 ans. Entre les stands d’audioprothésistes et ceux de vendeurs de fauteuils relax, les promoteurs immobiliers seront nombreux à vanter les mérites de leurs « résidences services seniors ». Avec des marques comme Villa Medicis, Jardins d’Arcadie, Senioriales ou Cogedim Club, la profession est en plein essor : 500 résidences, totalisant 36 000 appartements, sont déjà ouvertes et elles seront mille, d’ici à 2020.
Les résidences dites « services » ne sont pas médicalisées et sont plutôt destinées aux « seniors actifs », comme les promoteurs aiment les appeler et les représenter sur leurs brochures commerciales. On y admire des photos de septuagénaires sémillants et bronzés, pianotant sur leurs smartphones.
Ce public est, en effet, autonome, assez aisé mais fragilisé et à la recherche de sécurité, d’une vie sans souci, où toutes les tâches quotidiennes (cuisine, ménage, bricolage) peuvent être prises en charge dans un environnement convivial. Sur le papier, la formule est séduisante. Moins dans la réalité. Au point que la révolte gronde dans nombre de ces résidences aux charges exorbitantes et aux services pas toujours satisfaisants.
Christine Ravenne, ancienne journaliste, a passé quatre ans dans ce type d’appartements, de 2008 – pour ses 78 ans – à 2011. « J’ai investi dans deux appartements d’une résidence services pour seniors, à Brest : la location du premier couvrirait ainsi les charges du second. La résidence semblait luxueuse, avec un salon confortable, et elle m’a paru très gaie puisque, le jour de ma première visite, on y dansait le madison… En réalité, c’était une troupe de danseurs de passage. J’ai vite constaté que les repas et les animations étaient indigents. C’était un mouroir doré, avec, bien qu’il ne soit pas médicalisé, un défilé perpétuel d’infirmières, de médecins, d’auxiliaires de vie. Et le mouroir était dirigé par un dragon… »
Christine Ravenne a réussi « à se sauver » mais en y laissant son patrimoine puisqu’elle a revendu à perte, et elle raconte son expérience d’une plume alerte dans son livre Gagatorium (Fayard, 2014). L’un des premiers malentendus est l’âge d’entrée des résidents, bien plus avancé que ce que vantent les promoteurs, car les pensionnaires se résolvent tardivement à quitter leur maison familiale. Selon le Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées, l’âge moyen de leurs clients est de 82 ans, les plus jeunes ayant à peine dépassé la soixantaine, les plus âgés étant centenaires.
« Nous sommes arrivés, ma femme et moi, aux Senioriales de Grasse en 2009, à l’âge de 61 ans. J’étais le plus jeune et c’est toujours le cas », confie Didier Burggraeve, un « indigné », comme il se définit, fondateur de l’Association de défense des copropriétaires des Senioriales, qui mène la vie dure au promoteur, une filiale de Pierre et Vacances.
Avec 221 copropriétaires dans 18 résidences en France, M. Burggraeve a assigné le promoteur pour « mettre fin à une arnaque ». « J’ai découvert que, dans la plupart de ces copropriétés, l’appartement du gardien avait été cédé à un investisseur, à prix cassé, et nous sommes obligés de le louer à prix d’or, 1 200 euros par mois, pour y loger un gardien que nous sommes également forcés d’embaucher. Or, pour modifier cette clause du règlement, il faut l’unanimité des copropriétaires, impossible à obtenir ne serait-ce que parce que le propriétaire de la loge voterait contre, et que le promoteur détient encore souvent quelques lots et les droits de vote afférents. » Résultat : les charges sont deux fois plus élevées qu’annoncé.
Gérard Pinneberg, directeur de la communication du promoteur Les Senioriales, ne nie pas les faits mais argumente : « Tout était clair et transparent lors de l’achat. La présence de ce gardien, d’une animatrice, font partie du concept et nous en sommes les garants. »
Christine Ravenne a elle aussi dû batailler pour obtenir les comptes et comprendre le système de double charge, un forfait pour les services et les charges d’immeubles. En bonne journaliste, elle a infiltré le conseil d’administration de l’association qui gère les services et le conseil syndical de la copropriété. « J’ai découvert, dans les comptes, un loyer de 250 euros par appartement que paye la copropriété à la société qui détient les parties communes, une sorte de péage rien que pour avoir le droit de rentrer chez nous. »
De son côté, Jean-Georges Fauster a pris la tête de la fronde des habitants de la résidence des Senioriales à Prades (Pyrénées-Orientales). A 84 ans, cet Alsacien, ancien chef d’une entreprise d’exportation de fromages, a décidé de ne pas se laisser faire. A la suite d’une longue bataille juridique, il a obtenu que le promoteur répare les malfaçons, ferme la loge litigieuse, se sépare du gardien et de l’animatrice et vende le minibus attaché à la copropriété : « Nous avons divisé les charges par plus de deux, se réjouit-il, passant d’en moyenne 500 à 200 euros par mois et par appartement. Nous sommes parvenus à modifier le règlement de copropriété par un vote unanime, grâce à l’aide du syndic. Aujourd’hui, nous sommes débarrassés de cette chape de plomb et avons retrouvé la liberté. »
Les professionnels balaient ces critiques. « Ce sont des résidences de la première génération, où toutes les charges étaient obligatoires », plaide-t-on. La loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement de la population interdit désormais à la copropriété de facturer des services non utilisés. Quant aux nouvelles résidences, elles sont surtout vendues à des investisseurs et les appartements sont loués, ce qui laisse aux résidents l’entière liberté de déménager quand bon leur semble. « Il est important que l’exploitant reste propriétaire des parties communes, qu’il entretient et maintient aux normes », soutient Frédéric Walthier, directeur général du promoteur Domitys, numéro un du secteur.
Isabelle Rey-Lefebvre, pour LE MONDE , le 17.05.2017
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Dieu soit loué, il y a d'autres type de résidence !! Or gris veut les mettre en relief…On y travaille dans notre atelier "Habitat"…