"Vieillir actifs à la campagne"présentation/débat le 9 octobre
Introduction au dossier "Vieillir actifs à la campagne" Odile Plan/Or Gris
POUR 233, septembre 2018
"Dans le film « Une journée sans Mexicains » de Sergio Arau (2004), … les Mexicains disparaissent de la Californie, tout à coup et sans explication valable. Personne n’avait jamais soupçonné combien de problèmes de plomberie, de fuites de gouttières, de jardins envahis par les herbes, de maisons écroulées, d’ordures accumulées dans les poubelles municipales, d’enseignants manquant dans les écoles et d’infirmières dans les hôpitaux une telle absence pourrait provoquer.. Imaginons qu’en France, de la même façon inexplicable, tous les retraités disparaissent, que se passerait-il donc ? "…
"Villes dépourvues de maires, enfants laissés à eux-mêmes, populations fragiles sans ressources ni accompagnement, chute brutale de la consommation : la France sans ses 17 millions de retraités ne tournerait pas rond"[1]
Les « vieux »sont-ils un problème ou une chance pour les territoires, ruraux en particulier ?
Ce dossier, réalisé par « Pour » en collaboration avec l’association « L’Or gris », penche résolument du côté de la deuxième hypothèse… Pourtant les discours politique et médiatique dominants insistent prioritairement sur les aspects négatifs du vieillissement de nos sociétés. Il est vrai que nous sommes face à des transformations démographiques mal anticipées. A contrario d’un « jeunisme » triomphant – qui cependant n’empêche pas la difficile insertion des jeunes – l’image de la vieillesse est très souvent dévalorisée. Les vieux sont présentés comme une population à charge. Les politiques nationales abordent la question prioritairement sous l’angle géronto-médical : Alzheimer en est une des principale référence même si cette maladie ne touche que 2 à 4% des plus de 65 ans. Alors que font, que peuvent faire les autres, soit 96 à 98% de la population âgée ?
La première chose est de mettre en lumière la situation actuelle, la place des seniors dans nos territoires, celle qui leur est faite, entre autres, dans les nouvelles gouvernances des différentes collectivités territoriales, particulièrement dans les campagnes.
Les plus de 60 ans vont bientôt représenter le tiers de la population, l’espérance de vie s’allonge.
Les territoires vieillissent, particulièrement les territoires ruraux. C'est pour les collectivités un défi d'adaptation à ces mutations démographiques fortement différenciées d’un territoire à l’autre.
Dans le même temps, les relations entre générations ont été modifiées : le rôle des grands parents, a pris de l'importance, les relations intergénérationnelles se modulent. Pareillement, le rôle des aidants est enfin reconnu, y compris dans sa fonction économique. Ils doivent être accompagnés.
Le passage de l'activité professionnelle à la situation de retraité est une période clé, devenant une ouverture des possibles, et non une mort sociale…pour des retraités acteurs de la vie locale.
Pour aller plus loin, il faut constater que l'augmentation des populations retraitées est une opportunité pour les territoires. Les seniors, par le flux financier des retraites, sont parmi les principaux fournisseurs des revenus locaux. Ils sont les piliers d'une économie résidentielle, qui compense souvent la diminution des activités productives. Les activités de services s'adaptent à ces nouvelles populations, se développent, créent de l'activité et des emplois. Les retraités, natifs ou nouveaux arrivants, sont impliqués dans les territoires (qu'ils ont choisis) et constituent une part conséquente du marché local pour le bénéfice de tous. Les acteurs publics ou privés sont mobilisés dans les démarches participatives : services à la personne, mobilité, et surtout habitat…
La question de l'habitat pourrait paraître secondaire, mais elle est la clef d'une intégration et des possibilités de participation concrète à la vie locale. C'est aussi la première préoccupation des retraités. Les initiatives sont si nombreuses qu'il y aurait de quoi faire un dossier complet sur le sujet. Dans ce foisonnement de tous ordres, nous avons donné la parole à quelques initiatives adaptées au rural, à des actions participatives, adaptées, citoyennes et solidaires.
Les personnes âgées constituent des ressources locales rarement comptabilisées ; actrices des territoires, elles sont mobilisables dans une société pour tous les âges. Elles sont de plus en plus nombreuses, une fois à la retraite, à poursuivre des activités où à s’investir dans la vie sociale, économique, culturelle et environnementale. Porteurs de projet et/ou de compétences, bénévoles ou administrateurs, les seniors contribuent à la vie des associations, des collectivités locales, des entreprises, des organismes publics, par leur savoir, leur expérience et leur disponibilité. Les démarches locales participatives sont garantes de la vitalité des initiatives ; mais il faut veiller à une inclusion des seniors dans ces démarches.
Des témoignages, des récits d’expériences montrent comment les seniors se mettent au service de démarches territoriales, dans la Drôme, la Lorraine, la Creuse et ailleurs : mentorat, tutorat, accompagnement …Localement, ils créent, ils se mettent au service des habitants, participent à la mise en place d'initiatives, de lieux pour « faire et mieux vivre ensemble ».
Le développement de la « silver-économie » permet d’envisager un important potentiel de nouveaux emplois, notamment dans les avancées profitables à tous dans le domaine de la santé.
La question du vieillissement concerne toutes les couches de la population : les jeunes aussi se préoccupent des seniors. Ils créent des structures, bien au delà des services d'action sociale traditionnels, qui ouvrent la piste vers de nouvelles constructions collectives d'inter génération.
Reconnaître et favoriser l'activité des seniors c'est le meilleur moyen de leur donner une place responsable et d’induire de nouvelles dynamiques territoriales.
Pour conclure ce dossier, nous avons sollicité des experts et recueilli leurs réactions : comment anticiper et agir?
Connaissant les évolutions démographiques majeures, probables, des trente prochaines années, il est urgent de repenser la place des retraités et de leurs potentialités dans les domaines du politique, du social, du culturel et économique, dans la société rurale à la lumière des éléments apportés dans ce dossier. Les personnes âgées ont surtout envie de vivre et de faire, de participer à la construction d'une société faite pour toutes les générations, intégrant le grand âge et les nouveaux enjeux sociétaux
Il est important que les politiques et les acteurs du développement s’emparent enfin de cet enjeu, défi majeur des prochaines décennies et condition nécessaire d’un bien vivre et vieillir ensemble dans le monde de demain. Il y a une urgente nécessité d’intégrer ces transformations et évolutions dans toutes les démarches et les projets.
On demandait à Jacques Higelin comment il voulait mourir,
Il a répondu « Je veux mourir vivant »
[1] Article de Irène Inchauspé, publié dans l’Opinion 19 avril 2018.
"…17 708 villes françaises sur 34 516, qui n’auraient plus de maire, …panique sans les 15 millions de grands-parents français (chiffre Insee) qui assument vingt-trois millions d’heures de baby-sitting …(conduite à l'école, aux activités parascolaires, congés scolaires),…activité économique en chute avec une baisse estimée de la consommation de 40 %